Le ravitaillement en territoire occupé (1914-1918)
Entre détresse et marché noir
Résumé
Jean Heuclin rejoint Michel Haussy sur l’analyse de tous les réquisitions infligées aux populations occupées, mais son texte a une tonalité un peu différente. Il observe que la question du ravitaillement ne peut résulter d’une simple lecture des témoignages du temps, mais doit traquer les principes économiques et financiers qui guident la politique des autorités allemandes. Le Reich a une vision très bureaucratique, on dirait presque planifiée de l’exploitation des territoires occupés. Le plan de Walter Rathenau proposé au Kaiser dès août 1914, plus tard le plan Hindenburg visent à une exploitation méthodique de toutes les ressources après une évaluation exacte des potentialités des territoires. Les Allemands créent des centrales d’achats avec le soutien des municipalités qui surtout dans un premier temps à leur corps défendant, ont joué le jeu de la collaboration économique avec l’occupant. Pour les édiles, il s’agissait de permettre à leurs administrés d’échapper aux pénuries les plus extrêmes ; pour les Allemands il fallait absolument préserver la paix sociale sur les arrières de leurs armées, tout en envoyant dans une Allemagne maltraitée par le blocus naval la plus grande quantité possible de richesses prélevées dans le pays occupé. J. Heuclin reprend à nouveaux frais l’œuvre du Committee for relief in Belgium tout en proposant une périodisation. Il met aussi en évidence, ce que l’on dit peu pour cette période, l’ampleur du marché noir où de gros maraîchers et des propriétaires de grandes exploitations spéculent sur la misère de leurs concitoyens.